improvisation Arezzo - Bingen

Bonjour,

serait-ce une hérésie de pratiquer ce que nous livre le Micrologus de Guido d'Arezzo pour "improviser" de l'organum dans le répertoire d'Hildegarde von Bingen?

Je ne sais pas si c'est un argument, mais tous deux étaient bénédictins.

Merci pour vos réponses.

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Replies

  • Cher Nicolas

    Un dernier mot, parce que tu as écrit que tu t'intéresse pas trop pour les intentions de l'auteur, une position légitime pour un musicien, au moins pour quelques entre eux (malgré du fait que notre discours ici était tant dominé par les arguments historiques). Déjà en 1998, Richard Witts avait fait une discussion des variées interpretations de la musique associée avec Hildegard. Ce culte existait déjà dans les années 1990s.

    Witts, R. 1998. “How to Make a Saint: On Interpreting Hildegard of Bingen.” Early Music XXVI: 478–486. doi: 10.1093/earlyj/XXVI.3.478.

    L'article n'est pas trop intéressant, parce que les imaginations d'auteur autour de Hildegard ne sont pas actuelles concernant la recherche et l'édition des sources dans les dernières années (néanmoins, elles réflètent peut-être bien quelques réactions ici).

    Mais la récension des musiciens occupés avec ce repertoire est très intéressante. Il avait déjà mentionné les exécutions polyphoniques qui réflètent les idées de Barbara Newman à la fin des années 1980:

    There are other small differences—the Oxford
    Camerata perform in strict rhythm, Sinfonye burst
    into organum, some groups add instrumental
    drones and others vocal ones—but they are all dedicated,
    sincerely and successfully, to making something
    magnificent and profound from what may be
    little more than a whimsical set of notes and words.
    It seems that they have helped to turn a reactionary
    eccentric into a sagacious New Age saint.

    Il y a même quelque chose pour Marcel (le voci bianche incontrano le voci sanguini):

    Fixing these sky-high voices in gleaming acoustics
    greatly benefits the characterization of Hildegard's
    compositions as the saintly vehicle of the Holy
    Spirit's heavenly powers. Yet the actual textual images
    of her songs are frankly too mixed and diffuse to
    submit neatly to such a setting. It is only Marcel
    Peres's Ensemble Organum that offers a more austere
    option. Peres enlists deep female voices, centred
    on the B flat below middle C. Thanks here to an 'eastern'
    use of ornamentation, and a pulse steadied by
    an abbey reverberation, Hildegard sounds as much
    at home in Bir-Nabala as in Bingen. While this ensemble
    takes 10 1/2 minutes to perform Cum vox sanguinis,
    Sequentia sing it in 6 1/2 minutes.

    Alors Hildegardiens, il faut méditerraniser la musique!

    Tu pourrais trouver la discographie dans l'article.

    À la fin je voudrais remercier Luca, je n'avais encore connu ce longue article de Giulio Cattin qui me serve beaucoup. Il me semble qu'il parle plus d'une pratique depuis le XIII siècle, mais qui sait…

  • À propos les organa du X siècle en outre-Rhin (comme témoin de la pratique carolingienne avant Guy d'Arèce). Peut-être ça vous intéresse (regardez aussi l'annonce de Dominique):

    Giovanni Varelli a couramment découvert quelques exemples des organa ajoutés dans un manuscrit hagiographique de provenance Corvey, Werden etc. (British Library, Ms. Harley 3019, fol. 56v) que lui a datés dans le X siècle.

    Varelli, G., 2013. TWO NEWLY DISCOVERED TENTH-CENTURY ORGANA. Early Music History, 32, pp.277–315, doi:10.1017/S0261127913000053.
    Two Newly Discovered Tenth-Century Organa (Giovanni Varelli)
    Merci à Giovanni Varelli pour la mise en ligne de son article ! TWO NEWLY DISCOVERED TENTH-CENTURY ORGANA Giovanni Varelli Early Music History / Vol…
  • Excusez-nous cette digression sur Hildegard comme "pseudo-mystique"—sanctifiée comme amie de Bernard à Avignon, et à la fin reconnue comme part maternel de la patristique par Benoit XVI…

    Il me semble que Nicolas a lu l'introduction de Barbara Newman dans son édition:

    Hildegard of Bingen. 1998 (2e éd. après 1988). Symphonia: A Critical Edition of the Symphonia Armonie Celestium Revelationum with Introduction, Translations, and Commentary by Barbara Newman. Ithaca, N.Y.: Cornell UP, 31f. Google.

    Là, elle a trouvé deux indications de l'organum (lettre 47 citée selon PL 197, col. 220b-221a; sequenza no. 20, 4b) et voilà sa conclusion (son association avec Guy d'Arèce et sa main derivait de son interpretation de la cheironomie et "Adam comme le doigt de Dieu", et même le mot "organum" se trouve là):

    If Hildegard's phrase is not purely formulaic, it might indicate harmonized rather than monodic chanting, although one cannot make direct inferences from what Hildegard heard in her visions to what her nuns performed in their choir.

    Même si je n'ai pas réissu de suivre ses arguments, la vision néoplatonique (avec une confrontation entre la musique célèste et la musique humaine, les instruments y compris) de Hildegard—documenté dans la lettre no. 47—vaut une citation dans le contexte (mise en évidence par moi-même):

    Ut autem etiam divinae illius dulcedinis et laudationis, qua in Deo, priusquam caderet, idem Adam jucundabatur, et non ejus in hoc exsilio recordarentur, et ad haec quoque ipsi provocarentur, iidem S. Prophetae eodem spiritu quem acceperant, edocti, non solum psalmos et cantica, quae ad accendendam audientium devotionem cantarentur, sed et instrumenta musicae artis diversa, quibus cum multiplicibus [Col.0220C] sonis proferrentur, hoc respectu composuerunt, ut tam ex formis quam ex qualitatibus eorumdem instrumentorum, quam ex sensu verborum, quae in eis recitarentur audientes, ut praedictum est, per exteriora admoniti et exercitati, de interioribus erudirentur. Quos, videlicet sanctos prophetas, studiosi et sapientes imitati, humana et ipsi arte nonnulla organorum genera invenerunt, ut secundum delectationem animae cantare possent, et quae cantabant, in juncturis digitorum, quae flexionibus inclinantur, adaptarunt, ut et recolentes Adam digito Dei, qui Spiritus sanctus est, formatum, in cujus voce sonus omnis harmoniae, et totius musicae artis antequam delinqueret, suavitas erat, et si in [Col.0220D] statu quo formatus fuit, permansisset, infirmitas mortalis hominis virtutem et sonoritatem vocis illius nullatenus ferre posset. Cum autem deceptor ejus diabolus audisset, quod homo ex inspiratione Dei cantare coepisset, et per hoc ad recolendam suavitatem canticorum coelestis patriae invitaretur, machinamenta calliditatis suae in irritum ire videns, ita exterritus est, ut non minimum inde torqueretur, et multifariis nequitiae suae commentis semper deinceps excogitare et exquirere satagit, ut non solum de corde hominis per malas suggestiones et immundas cogitationes seu diversas occupationes, sed etiam de corde Ecclesiae, ubicunque potest, per dissensiones et scandala, vel injustas depressiones, confessionem et pulchritudinem divinae laudationis [Col.0221A] et spiritualium hymnorum, perturbare vel auferre non desistit. Quapropter summa vigilantia vobis et omnibus praelatis satagendum est, et antequam os alicujus Ecclesiae, laudes Deo canentium, per sententiam claudatis, vel eam a tractandis, vel percipiendis sacramentis suspendatis, causas pro quibus hoc faciendum sit, diligentissime prius discutiendo ventiletis.

    De quoi Hildegard avait parlé avec "genera organorum"? Les manières de chanter en organum? Et qu'est-ce que ça veut dire concernant l'exécution de ses compositions? Une instrumentation d'un choeur humaine flanqué par un choeur célèste?

  • You seem to be a little bit bored, but you already spotted the weakest point. The only thing you have to do now is to compare the Riesencodex with the other manuscripts or to have a look at the critical edition of Hildegard's letters, then you will have also the other history beyond the fiction or beyond "the more important one that the Riesencodex would like to tell us" as Margot Fassler would have called it.

    I am also curious about the news that Mike Kestemont and his students will tell us about two of their creators, the team Hildegard and her late scribe Guibert de Gembloux—definitely the most inventive one. Here is their latest publication:

    Kestemont, M., Moens, S. & Deploige, J., 2013. Collaborative authorship in the twelfth century: A stylometric study of Hildegard of Bingen and Guibert of Gembloux. Literary and Linguistic Computing, p.1-26, doi:10.1093/llc/fqt063.
    Documentary: "Hildegard of Bingen: Authorship and Stylometry" [HD]
    HD documentary, first shown 18 July 2013 @ Digital Humanities 2013 (#dh2013) -- in Lincoln, Nebraska, USA (http://dh2013.unl.edu/abstracts/ab-126.htm…
  • Le synode de Trèves,en 1147,a approuvé les écrits et l'action de Sainte Hildegarde,le Pape Eugène III lui-même lisait ses écrits devant une imposante assemblée,dont faisait partie Saint-Bernard,qui conclu:"Qu'il fallait se garder d'éteindre une aussi admirable lumière animée de l'inspiration divine"! A la suite de ce synode,Eugène III écrira longuement à Hildegarde une lettre élogieuse,citée partiellement par la médiéviste Régine Pernoud dans son ouvrage:"Hildegarde de Bingen,conscience inspirée du XII ème siècle." L'approbation d'Hildegarde est donc totale,de son vivant,de la part des autorités de l’Église!

  • L'anthropologue Amnon Shiloah a parlé sur le rôle des authorités réligieux de réagir aux personnages charismatiques dans le contexte du monothéisme. C'est pourquoi il n'est pas facile de les juger selon le livre, parce qu'ils sont important pour maintenir une tradition. Benoît XVI n'avait pas changé le statut ambigu de Hildegard (ici, vous trouvez le facsimilé de la charte du 1233), même c'est facile de faire ces gestes aujourd'hui ("rhétorique," si vous voudriez), concernant les charismatiques du présent il les a toujours excommuniqués comme on avait expecté de lui.

    Mais même qu'il est possible de faire une diaphonie guidonienne sur les compositions de Hildegard, il y a quelques cas élaboré, où il sembla de faire l'organum avec une voix ajouté d'une autre organum fleuri... D'un autre point de vue, Hildegard avait composé selon les conventions de son temps, les arrangements contemporains ou néogrégoriens des mélodies de l'antiphonaire.

    Regardez l'analyse de Jennifer Bain:

    Bain, J., 2008. Hildegard, Hermannus, and Late Chant Style. Journal of Music Theory, 52, pp.123–149. doi:10.1215/00222909-2009-012. JSTOR.
  • Les liturgies clunisiens avaient en effet favorisées les nouvelles compositions pour une exécution "cum organo," ceux du Benedicamus domino en particuliers, et ceux des genres du chant qui précèdent les leçons (graduels, alleluias, les derniers répons de la nocturne). Luca a parlé sur le fait que la liturgie à Rupertsberg était un peu particulière et pleine des nouvelles compositions qui ont aussi quelques difficultés envers certaines techniques de Guido.

    Je ne pense pas que l'attitude de Hildegarde envers l'écriture était rhétorique, sans doute la vraie modestie expectée d'une femme chrétienne de l'époque était ne dire rien et n'écrire rien (Hildegard avait fini avec le silence et avec certaines pratiques déstructives de l'ascétisme, usées excessivement par sa maîtresse). Peut-être l'arrangement et la recomposition de sa correspondence dans le Riesencodex était rhétorique, mais vraisemblablement pas la sienne, mais celle des écrivains à Rupertsberg.

    Sa manière d'être "ignota" était plus clandestine ou hermétique dans la manière non-représentative d'user les lettres secrets, il n'avait rien à faire avec la modestie. Ça correspond simplement avec la manière d'être approuvé à Rome, en fait, un vrai succès de l'Abesse avec ses désavantages (d'être documentée, censurée etc.).

    Mais, j'ai parlé simplement des pratiques mystiques qui ne vont bien avec l'alphabétisation. C'était déjà dehors de la mode, parce qu'il y avait une nouvelle conception du savoir qui s'apelle être "littrée". Même chez Bernard de Clairvaux, on trouve beaucoup des polémiques contre cette conception, malgré du fait qu'elle l'avait servi beaucoup. À Rupertsberg, la solution pratique était la division des compétences entre les visionaires et les écrivains (les derniers avaient même la fonction officielle des confesseurs).

    Ricossa a dit :

    d'ailleurs ses écrits furent approuvés, de son vivant, par le pape régnant. Que je sache, la seule véritable polémique venait d'une abbesse qui critiquait des attitudes, en effet criticables, des moniales de H. Elle s'en défend avec sa verve, mais les choses restèrent là. Quant à son illettrisme, si je m'en souviens bien, elle en parle elle-même, mais les historiens attribuent cela souvent à une forme de rhéthorique

    improvisation Arezzo - Bingen
    Bonjour, serait-ce une hérésie de pratiquer ce que nous livre le Micrologus de Guido d'Arezzo pour improviser de l'organum dans le répertoire d'Hi…
  • Bonjour M. Ricossa,

    J'entends votre réponse quant à l'organum proprement guidonien.

    Quant à la possibilité d'organiser, lorsque vous indiquez "les ordinaires souvent réglementent cette pratique", s'agit-il, comme l'on dit en droit, d'une obligation de faire ou d'une obligation de ne pas faire ? Autrement dit, les ordinaires prescrivent-ils de chanter en organum telle pièce de tel office, sans rien (inter)dire d'une telle pratique pour d'autres pièces ou d'autres occasions, ou bien vont-ils jusqu'à interdire de mettre en organum d'autres chants que ceux expressément désignés par eux ?

    Ricossa a dit :

    Un organum « à la Guido » me semble difficile à appliquer à ce répertoire, qui présente des structures mélodiques particulières. L'organum des IX-XI siècle est basé sur des structures de quarte, alors que les mélodies hildégardiennes adoptent désormais les nouvelles structures de quinte et quarte superposées.

    D'autre part il semble que oui, il fallait une permission pour organiser, vu que les ordinaires souvent réglementent cette pratique, de manière semblable aux prescriptions qui par la suite s'appliqueront au jeu de l'orgue (Giulio Cattin a fait d'intéressants travaux là-dessus). Les mélodies de H. étaient d'ailleurs prévues pour la liturgie et étaient donc des chants liturgiques à tous les effets, même si leur diffusion demeurait on ne peut plus limitée.

    improvisation Arezzo - Bingen
    Bonjour, serait-ce une hérésie de pratiquer ce que nous livre le Micrologus de Guido d'Arezzo pour improviser de l'organum dans le répertoire d'Hi…
  • La discussion de ses écrits à la synode n'était pas avant un cercle des amis de la littérature mystique, mais dans son temps elle était une personne très controverse, pour les bonnes raisons et les raisons bien connues. Mais, vous avez raison, je conseille de discuter avec les vrais experts, avec Stefan Morent, par exemple, qui est membre ici. 

  • Hildegarde de Bingen n'a jamais été considérée comme hérétique puisqu'elle a été nommé abbesse.Elle n'a jamais été canonisée par un "faux Pape d'Avignon".Il faut arrêter de dire n'importe quoi!

    De façon assez inhabituelle, Benoît XVI a confirmé le jeudi 10 mai, la sainteté de la mystique a... (1098-1179), une figure à laquelle il est particulièrement attaché et à laquelle il a déjà consacré deux catéchèses lors de ses audiences générales.

    Hildegarde, béatifiée en 1244 par Innocent IV et inscrite comme sainte au Martyrologe romain à la fin XVIe siècle, sera donc proclamée Docteur de l'Eglise dimanche 7 octobre 2012 par Benoît XVI, en compagnie du théologien espagnol Jean d'Avila.

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