Les signes spéciaux du tonaire de Dijon

Récemment un colloque s'est tenu à l'Abbaye de Saint Wandrille en honneur de Dom Pothier (1835-1923). Un des thèmes était les signes spéciaux du tonaire de Dijon. Jusqu'à présent, il y avait deux interprétations de ces signes : microtons et signes rythmiques. Ci-dessous en anglais une troisième interpretation. 

Voici l’abstrait de mon article en français:  

En 2018, Leo Lousberg a obtenu un doctorat à l'Université d'Utrecht sur la thèse selon laquelle les signes spéciaux du tonaire de Dijon représentent des « microtons ayant une fonction rhétorique ». Dans cet article, j'offre une vision alternative basée sur sept observations sur le contexte de ces signes. Je donne de nombreux arguments supplémentaires à l'appui de l'idée selon laquelle ces signes représentent simplement des tons sous-semitonales avec un avertissement concernant l'intonation correcte. Je souligne huit problèmes avec la théorie de Lousberg et analyse tous les signes du plus grand sous-ensemble du tonaire dijonnais : les offertoires. Enfin, j'esquisse une perspective pour des recherches plus approfondies sur de nombreuses questions liées au demi-ton.

Maessen_On_the_special_signs_in_the_early_eleventh-century_Dijon_ tonary.pdf

 

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Replies

  •  Et parlant de la répétition du même ton qui est montant, on trompe déjà !

    Si il y a un note normale suivit d'un oriscus au même hauteur dans la notation aquitaine par exemple, il y a la possibilité que l'oriscus n'est pas seulement un ornement, mais aussi une dièse. Je connais bien ces cas, mais la vérité est que la répétition n'est pas une répétition parce que le système de Volpiano est assez clair sur le sujet, seulement dans le solfège guidonienne (qu'il ne faut pas mélanger avec le solfège moderne), on pourrait dire E mi—E mi dièse—F fa, et sélon moi vraisamblement il y a aussi une troisième et quatrième ton avec l'intonation de la finalis sur un basse intonation de E mi qui en fait n'existe pas dans le système alphabetique depuis Boèce (ce type s'appelle AIANOEOEANE et c'est un cas particulier).

    Ici on parle des possibilités qui officiellement n'existent pas sur le niveau sémiotique et on a seulement les descriptions théoriques comme évidence (et le savoir que quelque chose comme ça existait bien dans les autres traditions contemporaines). Je ne pourrait pas exclurer qu'il s'agît d'un transfer, mais cette interpretation démande une historiographie qui accepte la possibilités des échanges entre les chantres.

    Voilà !

    • Nos messages se sont croisés. 

      Il est fort possible que l'oriscus ainsi que le quilisma indiquent des inflexions microtonales. C'est peut-être encore plus probable qu'avec les signes spéciaux. 

      La seule chose que je dis, c'est que l'interprétation de Lousberg est absurde (les signes n'ont pas une fonction rhétorique, mais mélodique) et qu'en outre les raisons que j'ai vues jusqu'à présent pour les « microtons » ne sont pas valides (en particulier l'argument dérivé de Tibi Domine). Sur cette base, je propose une explication alternative qui correspond mieux aux faits (mes sept observations). 

      Il est important d'écouter Wouter Swets. Swets était un des rares personnes qui savait tout sur le sujet des modes (makamat, ragas, echoi), théoriquement, mais surtout pratique. Comme Bartok, il a effectué de nombreuses recherches dans les Balkans et dans tout le bassin méditerranéen oriental. Il a ensuite mis cela en pratique avec ses ensembles.

      • Intéressant, ça vaut aussi pour moi comme éthnologue avec l'expérience de faire le chantre ou psalte. Et on comprend bien la différence !

        Le vrai problème, c'est ta langue ! Tu parles toujours du semitonium et une fois de l'intonation pure. L'intonation pure aujourd'hui, ça veut dire que on fait les tierces pures, mais les tierces pures n'existent pas dans le plain chant !

        On ne se fixe jamais à l'interval du semitonium, parce que on ne peut pas entendre une proportion comme 256:243. C'est simplement impossible ! On fait un quart pur entre ut et fa (4:3), mais le ditonus (81:64) entre ut et mi est un interval très large et dissonant avec des battements !

        La question des microtones ne commence pas avec la dièse, mais déjà par les intervals non-altérés !

        Et franchement si on peut intoner un interval connu dans tout le monde comme 9:8 (la différence entre le quart et la quinte pure), c'est même possible d'intoner des autres proportions comme 8:7 ou 7:6. Le dernier était décrit par Guido comme proportion entre re et mi pour faire la dièse (je ne dis pas que on doit utiliser cette proportion !). Alors ça, c'est presque le quart pur, mais si on voudrait concentrer à l'interval le moins grand (essentiel pour la distinction entre diatonique, chromatique et diatonique), plus enharmonique que les autres hemitona usés chez les psaltes orthodoxes.

        C'est trop dur pour maqām‘at ou raga et le genre diatonique est déjà "enharmonique" pour les oreilles des psaltes orthodoxes. C'est absolument latin !

        Et même le salicus microtonale (qui n'existe pas vraiment, parce que ce groupe est séparé par des syllabes), on ne fait jamais quelque chose comme ça (mi—mi dièse—fa). C'est « ultra grégorien » !

        Seulement une intonation basse du mi était un approchement aux habitudes des psaltes orthodoxes. Et c'est exprimé dans l'échéma AIA qui appartient au tetartos (comme mesos), pas au devteros.

  • Je dois admettre que tu m'as déjà perdu dans cette introduction.

    La discussion concerne deux parts de la notation de Guillaume de Volpiano, un chantre formé à Cluny qui était abbé-fondateur en Normandie et responsable pour les nouvelles fondations là, entr'elles aussi Mont Saint Michel (une fondation inspirée par l'exemple de Monte Gargano et son culte de l'arcange). Un part est la notation adiastématique en Île de France, autre un système de la notation alphabétique de l'intonation et seulement de l'intonation, bien connue depuis Boèce.

    Je suis d'accord avec Leo qu'il y a certain cas où on pourrait parlé d'une fonction rhétorique, une question entièrement basée sur la combinaison de la poésie liturgique et la notation, mais il ne s'agît pas de tout de l'interpretation d'un signe.

    On peut argumenter selon l'évolution de la notation il y avait deux stratégies vers une notation diastématique, celle italienne avec une introduction d'une interprétation verticale (mais connectant les points que c'est une difficulté pour les notateurs), celle occitane du même principe sans connectant les points (et plus facile d'écrire), celle de l'école ou des écoles de Guillaume qui combinent simplement deux notations bien existantes. On pourrait parler d'une competition entre ces deux principes et constater que les nouvelles notations (en Italie comme en Occitane) ont vaincues dans l'histoire. Si on voudrait argumenter sur le niveau sémiotique, on doit rester dans chaque système pour l'expliquer. J'aime bien ta notation et son orientation vers l'école sangalliene, mais ce sont déjà deux autres niveaux des signes et il faut les réfléchir bien !

    Résumant, les lettres chez Guillaume sont simplement mélodiques et rien d'autre, mais ça ne veut pas dire que seulement à Dijon ou en Normandie on avait utilisé la dièse, elle fait part aussi de la mutation chez Guido d'Arèce. Très probablement la perspective de regarder ce phénomène comme isolé, est condamnée de manquer le plein sujet.

    La vérité est très simple que on doit toujours demander où on fait la dièse dans un sens médíévale (et pas moderne !). Ça ne suffit pas du tout de démander où on fait si bémolle...

    • Les lettres ne sont pas simplement mélodiques. L'oriscus et le liquescent sont également indiquées avec les lettres. Autant que je sache, il n'existe aucune source contemporaine décrivant la signification des cinq signes spéciaux. Bien qu’ils correspondent en partie à des caractères grecs, ils peuvent aussi très bien être considérés comme des avertissements pour maintenir le ton ; pour éviter les « microtons ». Comme je le montre clairement dans la note 41, le seul argument (donné par Leo Lousberg et Ike de Loos) qui pointe réellement vers les microtons est invalide. Il est donc évident d’envisager une interprétation différente. Surtout parce que mes sept observations réfutent la théorie de Léo. Il est aussi tres important de lire l'annexe de Wouter Swets. 

      • Ah vraiment, tu voudrais dire que Léo a fait sa thèse doctorale sur l'usage des microtones pour les ignorer à la fin ?

        Franchement, on se fait les microtones normalement pendant les cadences, ça ne veut pas dire que c'est impossible de faire une relation avec le texte. Pendant une célébration, c'est bien normale, on doit se concentrer sur le texte, mais les microtones sont une chose que on fait automatiquement. Mais je conseille à s'engager dans ces détails, parce on comprend beaucoup mieux le mode et on se trouve dans un certain ton ecclésiastique grace aux microtones.

        Mais bien sûr, ils existent partout, non seulement dans l'école de Volpiano dans son abbaye plus préstigieux à Dijon et ses fondements nombreuses en Normandie, et il faut comprendre la différence entre les différentes notations pour les noter. Bien sûr la notation de Guillaume était une des plus claires et explicit sur tous ces détails. Peut-être illusion qu'il s'agît d'une habitude locale vient de là.

        Pour moi ça fait évident l'ignorance d'aujourd'hui vers le phénoméne modalité en générale.

        Mais, je ne suis pas d'accord de ton argument qu'il manque des explications, le contexte chez Guillaume est bien connu qu'il s'agît d'une notation des lettres qui se réfère au diagramme de Boèce qui traite rien d'autre que les intervals (bien décrit et comparé par Nancy Phillips). Chez Volpiano, on a finalement (avec un rétard des siècles) la solution qui était déjà demandée par Aristoxène (parce que ces notations des lettres étaient bien connues dans son époque et bien sûr l'inspiration pour ce genre de notation chez des théoriciens latins vient des traités grecques). Un système des lettres (latin, pas grecque !) qui se réfère dans l'ordre seulement aux éléments diatoniques (sans conter les dièses comme des intervals résérvés au genre enharmonique ou des autres intervals causés par des transpositions). C'était la raison, pourquoi les notations alphabétiques étaient jugées amodales et inutiles pour les musiciens par Aristoxène. Je ne connaît pas Swets, mais une interprétation des signes spéciaux chez Volpiano comme un γ (écrit comme majuscule), depuis la notation médiobyzantine un signe qui était à l'origine un signe du tempo (pas rhythmique comme plus tard) avec la signification γόργον et sa inversion pour signifier argon (pour remplacer ἄργον, à l'origine s'avait sa propre abbréviation) me semble une interprétation pas seulement aventurieuse, mais dehors aucun contexte.

        On peut apprendre l'intonation des microtons, ce n'est pas grave ! Je l'avais fait avec l'aide de la composition "Stimmung" de Karlheinz Stockhausen. Ça aide beaucoup pour reconnaître les harmoniques et de s'en servir avec conscience ! Et Lenka Mračkova était avec nous.

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