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Tableau synoptique:

Proposition de restitution:

Commentaire:

Le bréviaire romain fait chanter cette antienne aux matines du mercredi, tandis que le rit monastique la place aux laudes du mardi.

Les versions de cette antienne, publiées à ce jour, proposent le 8ème mode:

Cependant, dans la tradition sangallienne, une évolution de la neumatique permet de voir un déplacement du sommet mélodique à "IN" (signalé par une virga épisémée dans Hartker) vers "TE" dans Saint Gall 413.

Nous avons une forte présomption de penser que se manifeste à Saint Gall, à l'aube du XIème siècle, le passage d'une construction SOL-SI bémol (modalité en RE) à une construction SOL-DO via SI bécarre.

Cette évolution est confirmée par les mss sur lignes de la zone germanique, tandis que de nombreux témoins du Rhin/Régions basses, du Nord de la France et de la Lorraine suivent notre restitution (SOL-SI bémol). C'est aussi le cas de la tradition clunisienne, cette dernière exerçant progressivement  son influence dans la tradition de Saint Martial (lat 777, XIème, a DO/SI bécarre, tandis que lat 781, XIIème, a RE/FA). Le reste de la zone aquitaine (sauf Silos 9) a DO/SI bécarre.

La tradition italienne suit d'assez près le choix du Vieux Romain (ici, ROM2 = lat 29988). Cependant, ROM ne saurait constituer une version de choix pour une restitution, son éthos se refusant à exprimer une formule en RE (SOL/SI bémol). Pour s'en convaincre, il suffit de regarder sa version de l'Ant Nos qui vivimus (formule du type "confirma hoc Deus"). Ajoutons au passage que ROM a très certainement construit l'incipit "quoniAM" avec un bémol en son sommet !

La tradition cistercienne qui ignore cette antienne, est prise en "flagrant délit" de retouche d'une autre antienne en RE (il s'agit de l'antienne In Ecclesiis)

Pour conclure, l'évolution architecturale peut être résumée de la manière suivante:

Evolution de la seule partie centrale :"in te confidit", le reste demeurant stable dans la configuration en RE :

1) SI b /LA/SOL/SI b/LA

2) Montée globale d'un ton: DO/SI bécarre/LA/DO/SI bécarre (par ex Lyon)

3) Permutation des deux premières notes: SI bécarre/DO/LA/DO/SI bécarre (les Chartreux...)

Une question reste lancinante:

Pourquoi une telle attraction au DO dans cette antienne pour un nombre appréciable de témoins, alors que ce genre d'évolution est nettement moins marqué, par exemple dans des antiennes comme "Nos qui vivimus" , "In ecclesiis" ou "Laurentius bonum opus" ?

Nous croyons pouvoir en donner une explication par le fait qu'un mot important, "in TE" a puissamment contribué à cette attraction. Nous avons vu ailleurs dans le répertoire ce phénomène à l'oeuvre (citons par exemple le répons bref de la Septuagésime: Spes MEa, "MEa" provoquant une élévation universelle à DO, alors que l'incipit du verset "in te confirmatus sum", de même facture, passe par le SI bémol).

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Replies

  • En ce qui concerne les bémols ROM en début et en fin d'antienne, je souscris totalement.

    En ce qui concerne l'ANT Nos qui vivimus, il ne me paraît pas exclu que la mélodie ait été construite à partir d'un modèle ROM, l'ANT Sancti Domini, passée en GREG avec le changement de "Sancti" en "Martyres", pour des raisons qui restent encore à définir...Par ailleurs, il me semble intéressant d'observer qu'en dehors de ROM, la variante Sancti Domini ne se trouve que dans le Compediensis...Ce qui renforce l'origine ROM du timbre utilisé dans "Nos qui vivimus" !

  • Tout à fait d'accord avec vous, Franco !

    La version en deuxième mode prédomine dans les témoins monastiques, peut-être sous l'influence clunisienne...

    A ce propos il est intéressant d'observer que dans lat 777 (XIème siècle), la mélodie culmine sur DO/SI (bécarre) tandis qu'un siècle plus tard, dans lat 781, nous constatons la version du deuxième mode. On sait en effet l'influence forte exercée par Cluny à Saint Martial dès la seconde moitié du XIème siècle.

    Un réponse définitive en faveur de la version ci-dessous:

    9126783684?profile=original

    a été donnée par Dom Guilmard dans son excellent article: 

    Nécessité et limites du recours aux mélodies pour établir l’histoir..., en particulier ce qui est dit concernant le ton pérégrin (se rendre à la page 17 du pdf de notre lien).

    https://storage.ning.com/topology/rest/1.0/file/get/9126783684?profile=original
  • Again a wonderfull piece of work, but I'm not convinced.

    First, why would Hartker consider the melody you propose as Mode VIII? Only a minor third above the finalis. There are examples on your tableau but those are Mode II.

    The positioning of the virgae in SG 413 indicate clearly that te is higher than in. The episema has the function to emphasize the following word.

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