déchiffrage paléographique : Ms de Montecassino

Bonjour,

dans cette miniature relativement connue, issue du De Rerum Naturis de Rabanus Maurus Magnentius (c.780-856), daté de 1023 et conservé dans les archives de l'abbaye de Montecassino (semble-t-il : Cod. Casin. 132), est figuré un instrument de type luth.

Sous chaque cordophone est inscrit un mot en rouge : sous le pluricorde à résonateurs est inscrit "musica", sous la harpe (Rote? psaltérion?) est inscrit "arpha". Sous le luth est inscrit un mot qui reste indéchiffrable. 

Je cherche à résoudre ce mystère depuis plusieurs années.

Je transmets l'image l'ensemble, le luthiste en particulier ainsi que le détail de l'inscription.

Quelqu'un parmi vous serait-il en mesure de proposer une interprétation?

Je vous remercie d'avance pour vos lumières expertes.

Olivier

montecassino-Rabanus Maurus Magnentius-1023 manuscript of De Universo by Raban Maur - 780-856 German theologian and writer.jpg

montecassino.jpg

image.jpg

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Replies

  • Merci! Moi non plus je ne vois pas de "T", mais il manque une lettre bleue. Et l'instrument nous offre un petit jeu etymologique: il a un visage barbu à droite (c'était peut-e.tre une après-pensée du dessinateur)... 'Barbiton' se trouve aussi, disent les dictionnaires, chez Martianus Capella (et Horace, Ovide).

  • Le ms. Lescalopier est une autre source iconographique majeure pour le luth de l'époque romane (le luth est clairement identifiable grâce à son plectre). Il est ici nommé "cythara", comme la vièle un peu plus tardivement dans ce même contexte de David et ses musiciens.

    Le scribe à dû être embarrassé lorsqu'il a été amené à nommer la rote ci-dessus, puisque le terme "cythara" était déjà occupé par le luth! D'où peut-être son idée de faire appel à "barbito", un autre terme emprunté au grec qui à l'origine désignait justement les grandes lyres de l'antiquité. Ceci n'est pas sans souligner qu'il y avait peut-être au XIe siècle, dans les systèmes de classification savants, une équivalence organologique entre la rote et la grande lyre Barbiton...

    Soit dit en passant, je ne vois pas le T du mot "barbito"!... La référence à Ausonius est-elle tirée un texte contemporain ou plus tardif? Sans quoi il n'est pas surprenant de la part d'un auteur du IVe siècle....

    Je tends à penser que cithara / cythara reste un terme classificatoire des cordophones à manche propre au contexte biblique de cette période, et ne peut être à ce titre considéré comme une terminologie qui pourrait être en usage dans d'autres contextes. La terminologie vernaculaire ou latinisée attachée au luth des périodes carolingienne et romane nous échappe toujours. D'où la frustration de ne pouvoir déchiffrer cette inscription de la miniature de Montecassino! qui selon moi reste la plus pertinente, car n'évoquant pas le terme cithara. Je reste convaincu que si nous parvenions à le déchiffrer, nous aurions un terme exempt de symbolique biblique qui nous permettrait enfin de nommer cet instrument majeur dans les pratiques musicales de ces période!

  • And here's a late 11th-century image in which Idithun's instrument has an interesting name: the reading "barbito" has been suggested at http://www.enluminures.culture.fr/documentation/enlumine/fr/  - Ausonius speaks of a musical instrument Barbiton. In this source, too, Asaph's fiddle is called a cythara.

    Amiens - BM - ms. Lescalopier 002
    f. 011,5v-011,6

    IRHT_063764-p.jpg

    IRHT_063761-p.jpg

    Enluminures : base de données
    La base de données Enluminures, produite par le Ministère de la Culture et l'Institut de recherche d'histoire des textes, offre l'accès à des millie…
  • Thanks for adding this exemple. Ii seems the fiddle is one more time called cithara, isn't it?

  • Here another image of the same scenario and Asaph, Eman, David, Ethan...

    Pommersfelden Bible, 11th century, Graf von Schönbornsche Schlossbibliothek 334 fol. II, f.148v

    9126849086?profile=original

    Dominique Gatté said:

    Le manuscrit Latin 5371 de la BNF vient tout juste d'être mis en ligne, nous y retrouvons quelque chose d'un peu semblable avec Asaph, Emath et Ethan dont à parlé Pavlos Erevnidis

    9126818685?profile=original

    Cette source est déjà connue depuis quelques années... (voir)

    déchiffrage paléographique : Ms de Montecassino
    Bonjour, dans cette miniature relativement connue, issue du De Rerum Naturis de Rabanus Maurus Magnentius (c.780-856), daté de 1023 et conservé dans…
  • Aurélien: "cytharam in pectore"

  • Merci pour ces précisions.

    Ce genre de métaphores ne désigne-t-elles pas seulement les cordes, notamment de boyau? Je me demande donc si l'on peut admettre que le détail (la corde et sa matière) puisse désigner le tout (l'instrument)... J'imaginais plutôt un terme classificatoire comme "cithara" pour instrument à corde tel qu'on le trouve dans le Ms Latin 5371, ou mieux, un terme attaché à son objet précis tel que "harpa". 

  • Aurélian de Réôme avait en fait utilisé la même métaphore comme l'auteur de la fameuse hymn de solmisation (regardez le longue article de Susan Boynton dédié au sujet), même si les fibres vibrants de la voix ne se trouvent dans les poumons concernant l'anatomie humaine ;D Il s'agît en fait d'une civilisation assez basse dans ce periode (au moins concernant la Méditerranéenne)...

  • Apropos de "fibris"pour chordophones, j'ai regardé au TML, 6e-11e siècles, et n'y ai trouvé qu'une seule instance métaphorique. Aurelianus Reomensis fait comparaison du corps humain avec des instruments de musique: les fibres des poumons sont comme les cordes d'une harpe.C'est dans le premier chapitre.

    Normalement,  "fibra" signifie la voix humaine ou les poumons (> Ut queant laxis resonare fibris....).

    Author: Aurelianus Reomensis

    Title: Musica disciplina

    Source: Joseph Perry Ponte III, "Aureliani Reomensis Musica disciplina: A Revised Text, Translation, and Commentary," 3 vols. (Ph.D. dissertation, Brandeis University, 1961)

    Full text: AURMUSD

    TML found 1 match in the text of this treatise. 

    Homo etiam ipse, quanta congruentia huic aptetur discipline, non dubitabit qui scierit omnia se habere, quae solet huic arti tribuere: habet enim cantandi fistulam in guttere, quandam cytharam in pectore, pulmonis fibris quasi quibusdam distinctam cordis, elevationes atque gravationes in venarum pulsuumque refluas mutationes.

  • Non, "fibris" comme le nom des cordophones était métaphorique, il mot vient des fibres des plantes ou des animales (même les cordes fait des intestins), mais il dictionnaire parle aussi du "filum" ("string in both senses"):

    http://www.perseus.tufts.edu/hopper/text?doc=Perseus%3Atext%3A1999....

    Je ne pense pas qu'il s'agît d'une expression commune, c'est notre pauvre effort de déchiffrer ce manuscrit montcassinien.

    Mais, regardez cette instrument dans le médaillon du tonus primus à Cluny, c'est la même posture du joueur avec une instrument en forme d'une vielle ! Il n'a pas d'archet comme dans le tonaire de Saint Étienne !

    Charlton T. Lewis, Charles Short, A Latin Dictionary, fī^bra
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