Si l'Antiphonale Monasticum de 2005 constitue un progrès appréciable du point de vue de l'utilisation des si bémols par rapport à son aîné de 1934, son emploi a malheureusement été systématiquement évité aux quilismas. Pourtant, plusieurs cas mériteraient une réanalyse.
Citons, à titre d'exemple, l'Antienne Per arma justitiae:
A "virTUtis", le quilisma central est signalé par le code typographique, comme étant un bécarre. Cependant, deux arguments nous induisent à bémolliser ce quilisma.
Le premier argument s'appuie sur le témoignage de ROM, dont l'équivalent mélodique ne laisse aucun doute, dans sa construction, sur l'emploi du si bémol. A cet effet, nous avons mis en regard l'Antienne Tanto pondere (en 1er mode dans ROM) et le répons Canite tuba.
Le deuxième argument s'appuie sur la comparaison, en GREG, des antiennes Cum audisset Job et Per arma justitiae, où la mélodie de "virtutis" reprend celle de "nuntiorum" dans la première antienne !
Dans tous ces cas, une restitution devrait donc logiquement attribuer le signe du bémol devant tous les quilismas.
Replies
Il me paraît cependant assez assez probable que , dans le cas de l'exemple 1, "omnia" est associé à "continet", alors que dans l'exemple suivant, déjà cité ailleurs, tiré du manuscrit Grande Chartreuse 808,
pour une même architecture mélodique, des enchaînements verbaux différents ont entraîné des choix différents pour le SI:
"Haec est quae nescivit torum in delicto" / "habebit fructum" : [Ex 1] le SI , à "deLICto", lié de ce fait aux DO précédents, est bécarre
"Favus distillans labia tua sponsa" / "et odor vestimentorum tuorum" : [Ex 2] à "et Odor", le SI, sommet d'une incise qui aboutit au MI, est bémol !
Toujours dans Arras 465, mais pour proposer cette fois quelques "contextes clairs" induisant le choix du bémol sur un quilisma, à l'instar du passage "illic sedimus" (OFF Super flumina), discuté ci-dessus...
La note centrale du pes LA-SI-DO bénéficie d'un contexte bémollisant (à "TOLleret" , a parte ante, et à "DomiNUS" a parte post) [Ex 1]
Cas similaire à "nec ros NEC pluvia" [Ex 2]. Dans cet exemple, de nombreux témoins (souvent de tradition germanique), élargissent la deuxième note du torculus de "ROS" à la tierce (mineure) SOL-SI(b)-SOL.
A propos de 5ème mode, le témoignage d'Arras 465_(cat_893)] est symptomatique de la présence du si bémol sur le quilisma. L'étude comparative est fort intéressante : Le bémol, à "OMnia" [Ex 1] est confirmé de deux manières :
tout d'abord par la présence de ce signe au mot précédent ("conTInet"),
et surtout par le fait que le podatus LA-SI-DO constitue le développement "organique", en quelque sorte, du pes LA-SI bémol de "ORphanos" [Ex 2].
Le bémol, à "COR" [Ex 3] qualifie les deux SI, et celui qui le suit et celui qui le précède, comme c'est souvent le cas dans la tradition manuscrite. Nous sommes ici au stade du développement maximal de la formule.
Μια παραπάνω ματιά στο R. Obsecro Domine θα είχε ενδιαφέρον σχετικά με αυτό το θέμα.
Je pense que les tierces "vides" procèdent plutôt de la nature du quilisma que d'une quelconque "gêne" intervallique...
Le quilisma, de par sa nature même, à la différence du pes quassus, est une note transitoire, mais, à la manière des liquescences, elle se conforme généralement au contexte environnant.
L'étude, en effet, de l'INTR Exsultate, est biaisée par ce problème de SI bémol au grave. Cependant, la majorité des mss qui, dans l'échelle de DO, notent le FA à "praeCEPtum", ne semblent nullement gênés de l'emploi du FA...pas une hésitation, pas un grattage...
A ce stade de notre échange, le témoignage de Montpellier nous semble intéressant :
INTR Ecce Deus adjuvat me Graduale Triplex (= GT) 307 :
Le pes LA-SI bémol de "ADjuvat me" est développé d'une manière organique, à "DOminus" tandis que, dans l'exemple suivant, à "SANCto", le "i" de Montpellier est droit (ce qui n'est pas une preuve absolue en faveur du bécarre, le I couché constitue une certitude, le I droit exigeant plus de discernement).
Quoi qu'il en soit, le témoignage de Montpellier sur l'influence du contexte modal sur la quilisma s'observe d'une manière évidente dans le Trait Saepe expugnaverunt me (GT 122) :
Au premier "JUventute" , l'environnement proche, bémollisant, a influencé le quilisma, trduit par un I couché (donc bémol).
Le second "JUventute" , précédé d'une mélodie fortement appuyée sur le bécarre, bénéficie d'un I droit (donc bécarre).
Un contexte bémollisant peut aussi influencer un quilisma "a parte ante". Ceci est observable, toujours dans Montpellier, dans l'OFF Super flumina (GT 345) :
Le I couché de "sediMUS" induit, par anticipation, le I couché (donc bémol) pour le quilisma de "SEdimus",
de la même manière que, dans Introit Exutate Deo le bémol (FA en transposition) est certainement anticipé au quilisma de "paeceptum" :
ce qui explique l'absence de "malaise" chez les scribes qui utilisent l'échelle de DO.
Le SI bémol est d'ailleurs parfois explicité, et ceci dans des contextes qui ne nécessitent aucune transposition. Il suffira de l'observer, par exemple, dans la Communion Voce mea (GT 71) :
Pas de bécarre explicite dans la tradition, comme dans l'introit Exultate Deo, mais quand le SI est qualifié, il est bémol !