Le manuscrit Mas 138 de la Bibliothèque de l'École nationale supérieure des beaux-arts de Paris est un manuscrit de la fin du XIème début XIIème siècle originaire de l'Est de la France, provenant de l'Abbaye Saint-Pierre d’Hautmont, contenant principalement des vies de saints et des versus.
Trois versus ont reçu une notation contemporaine au texte.
85r Item versus cuiusdam doctoris : Ut belli sonuere tubae violenta peremit...
85v Versus Prisciani de XII signis : Ad Boree partes Arcti vertuntur.... ; Eiusdem de XII ventis : Quattuor a quadro consurgunt limite venti. His quoque octo gemini...
D'autres additions musicales, en notation neumatique lorraine, ont été faites au cours du XIIème siècle. 66r In dedicatione ecclesiae Sequetia. Clara chorus dulce pangat (AH 54:94) ; 75v S. Marcialis apostolus officiium [In.] Iustus ut palma* ; R/ Isutus ut palma* ; All. Ipse peibit ante illum* ; Of. In virtute tua domine ; Co. Psuisti domine*. 86r R/ Evigilans Noe ex vino... V/ Benedictus dominus deus...
L'addition la plus important de ce manuscrit est certainement celle concernant la théorie musicale aux folio 130v et 131r.
Au folio 130v, nous voyons une main guidonienne avec une particularité unique, jamais vu jusqu'à ce jour. Il s'agit de la correspondance des notes en notation dasianne.
Au folio suivant (131r), nous trouvons un traité, inédit jusqu'à ce jour, qui est une clef de lecture de la main guidonienne.
Je vous propose l'édition du texte ci-dessous :
De notis musicae artis quibus per cuncta tetracorda cantus quos volveris calculare valeas animadverte. Intimabo paucis. Incipiens a G prima monocordi litera quae ponitur, in principio pollicis et ibi pones vt, In secundo articulo Re In tertio mi. In quarto quarte primus in indice pones fa et in eodem vt ut cum cantus ascenderit pronuntietetur vt. Cum uno descenderit ad inferior quae sunt in pollice dicatur fa in secundo eius articulo. Inde in medio digito ut bene nosti ponitur Re. In anulari mi. In auriculari uno fa. In secundo eius loco sol et in eodem vt scilicet propter ascendentem cantum. Inde progrediens ad tertium articulum per dicti auricularis ponito ibi La quae vox etiam dici poterit Re. In summo uno digiti eiusdem ponito mi In sequentis uno summo fa quae vox erit etiam vt sicut priori factum est tetracordo propter ascendentem cantum. Inde precedens in summo medii digiti ponitur Re. In indicis uno summo mi. In primo eiusdem articulo fa. In sequenti Sol. Sic omnis cantus per manuale monocordum cantare poteris si sollerticura ad aequae predicta sunt diligentiam adhibebis.
Replies
L'auteur de cette main était peut-être en dilemme, entre le système de la Musica enchiriadis et celui de Guido...
Deux points:
Exactement, mais il correspond à la synthèse byzantine (au moins dans la Papadiké) où chaque note a son échos (mode) !
Les noms des tetracordes en fait viennent de la Musica et Scolica enchiriadis pour tourner les signes dasianes, mais si on croit Charles Atkinson, ces traités étaient déjà connus chez Hucbald...
Il y a en effet quelques indications surprenantes dans la main elle-même. D'abord, les quatre tétracordes sont désignés par les expressions GRAVES, finales, SVPeRioReS et ExceLLENTES, qui viennent d'Hucbald, je pense. Dans chacun d'entre eux, en outre, les quatre notes sont marquées protus, deuterus, tritus et tetrardus, dans différentes abréviations. Ces nombres grecs latinisés sont plus souvent réservés aux modes du plain-chant; pour les modi vocum, les modes des notes, Guido par exemple utilise plutôt primus, secundus, tertius et quartus. Les quatre tétracordes paraissent être Γ A B C; D E F G; a h c d; et d e f g.
L'anomalie est que les deux premiers tétracordes ne sont pas conjoints (ceci reproduit la situation normale de la notation dasianne), alors que les deux derniers semblent conjoints (comme chez Hucbald à cet endroit). Je pense donc comme Oliver Gerlach qu'il y a un conflit entre deux conceptions, l'une en tétracordes tous disjoints, comme dans la notation dasianne, l'autre en tétracordes alternativement conjoints et disjoints, comme dans l'échelle d'Hucbald. Les syllabes de solmisation indiquent une troisième conception, hexacordale, la seule décrite dans le texte (mais aucune syllabe ne correspond aux hexacordes par bmol); et la notation alphabétique dénote une quatrième conception, heptacordale.
Tout cela fait de cette image une synthèse curieuse et inhabituelle.
Seulement présent dans la main ! Les compromis entre notation dasiane (tetraphonie) et l'heptaphonie (dans le cas de Guido même organisé par hexacordes) sont bien connus dans quelques tonaires où la notation dasiane était assez populaire (regardez ceux de tropaire de Winchester ou le «Commemoratio brevis de tonis et psalmis modulandis» écrit par Hoger de Werden):
http://bsbsbb.bsb.lrz.de/~db/0000/sbb00000078/images/index.html?sei...
Ici, j'ai ajouté les lettres Guidoniens :
Echéma du Plagi protus ou tonus secundus (D-BAs Ms. Msc.Var.1, fol. 44r)
Dans la main ils sont aussi indiqués par "protus, deuterus, tritus, tetrardus" !
Merci, mais je n'arrive toujours pas à expliquer la présence de la notation dasianne....
Christian Meyer said:
«ad eaquae», non «ad aequae» !
Emacs avec les components préinstallé par Vincent Goulet (Canada) :
https://vgoulet.act.ulaval.ca/en/home/
ça fonctionne sur windows, sur mac, même sur linux.
C'est tu as une pleine installation de LaTeX (tous les deux sont open access), tu pourrais choisir librement entre tous les formats sans perdre les temps avec les formatations désastrueux qui normalement ne sont pas faits bien.
Si tu as intérêt, je te pourrais envoyer les descriptions en anglais que j'avais preparé pour mes collègues...
Oliver Gerlach said:
Oliver Gerlach said: